Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/74

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dans notre pays, à un degré plus considérable que dans aucun autre pays de la terre, que nous devons de constater que l’histoire de l’Union n’a présenté aucun cas de guerre civile, en même temps qu’elle a présenté une somme d’activité pacifique bien supérieure à celle qui existe ailleurs. Détruisez les gouvernements d’États et centralisez le pouvoir entre les mains du gouvernement général, et vous aurez pour résultat une diminution constante dans la puissance d’association volontaire en vue des travaux de la paix, et un accroissement dans la tendance à l’association forcée ayant la guerre pour but. Détruisez le gouvernement central et les conflits entre les divers états deviendront inévitables. Les populations de la Grèce avaient encore à apprendre toutes ces vérités, et les conséquences s’en retrouvent dans les guerres fréquentes qui éclataient entre les états et les villes ; résultat de l’établissement d’un gouvernement fortement centralisé, maître absolu des dépenses demandées au trésor public, qui se remplissait des impôts levés sur mille cités sujettes. Depuis lors ces cités perdirent le pouvoir de s’associer pour la détermination de leurs droits respectifs et durent recourir, pour obtenir justice, aux tribunaux d’Athènes. C’est à Athènes que s’adressaient tous ceux qui devaient payer de l’argent à l’État ou en recevoir, tous ceux qui avaient des causes à plaider, tous ceux qui recherchaient des places donnant pouvoir ou profit, tous les individus qui se trouvaient dans l’impossibilité de vivre dans leur pays et ceux encore qui préféraient la rapine au travail ; à chaque pas dans cette direction, la décentralisation céda devant la centralisation, jusqu’à ce qu’enfin Athènes et Sparte, Samos et Mitylène et tous les autres états et villes de la Grèce furent enveloppés dans une commune ; l’Attique même, devint en grande partie la propriété d’un seul homme, entouré d’une multitude d’esclaves ; la disposition à l’association volontaire et le pouvoir de la mettre en pratique avaient disparu complètement.

Si nous jetons nos regards sur l’Italie nous y apercevons une série de faits analogues. Aux époques les plus anciennes de leur existence l’Étrurie et la Campanie, la Grande-Grèce et le territoire montueux des Samnites, offrirent à l’observateur des villes nombreuses, servant chacune de centre à un canton, dans l’étendue duquel existait à un haut degré l’habitude de l’association locale et volontaire. Avec le temps nous voyons cette habitude disparaître