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les quatre fils aymon

aidée par leur connaissance de l’épopée générale, a fait le reste, mais sans pouvoir effacer complètement le défaut de continuité qui résulte de l’introduction d’éléments karolingiens entre les parties d’origine mérovingienne.

Dans son livre sur les Évangiles, Renan, arrivé aux persécutions que Domitien exerça sur les chrétiens et sur les juifs, dit : « Un écho indistinct de tous ces événements se retrouve dans les traditions juives » ; et il résume une légende où subsiste seulement ce qu’il appelle lui-même : « de bien vagues images et comme les souvenirs d’un hémiplégique »[1]. Les traditions de notre histoire primitive ont mieux résisté à l’épreuve des siècles et au travail des remanieurs. Mais quelle que soit la destinée des vues que je me suis permis de présenter, l’on jugera sans doute que l’étude de la matière et de la langue des Fils Aymon doit s’étendre à d’autres versions que celle que je réédite d’après le manuscrit La Vallière.

Dans le tableau ci-dessous l’on a l’ordre où je rangerais les

    la seule qui puisse donner une explication pour le rôle énigmatique du satellite Maugis ». L. l., p. 21. Mme  Loke (Les Versions néerlandaises de Renaud de Montauban, p. 184) accepterait le bien fondé de ce jugement. Ces remarques m’obligent à revenir sur ce que j’avais dit ailleurs à propos de Maugis et de Ragenfred. J’ai d’abord soupçonné qu’il faut rechercher sous le nom de Maugis un personnage dont la lutte avec Charles serait motivée de manière plus précise que dans les Fils Aymon : La haine implacable de Charlemagne pour Maugis, l’acharnement avec lequel il le réclame au point d’oublier ses griefs les plus légitimes, c’est-à-dire les meurtres de son fils Lohier et de Bertolais, me semblent absolument inexplicables, si l’on ne suppose qu’entre Charles et Maugis il y avait guerre ouverte depuis longtemps. Maugis et Bayard obsèdent la pensée de l’empereur et il refusera jusqu’au bout de se réconcilier avec eux (Recherches, p. 86 ; cf. 43-50). Plus tard, me plaçant sur le terrain des origines historiques, j’ai examiné brièvement le rôle de Ragenfred. Je rencontrais des faits de nature épique. (V. Maugis d’Aigremont, p. 9-10). Ma première impression fut qu’il y avait une parenté entre Eudes et Maugis, entre Ragenfred et Renaud. Ce cheval que le hasard offre au guerrier vaincu, ne serait-il pas le prototype de Bayard ? Aujourd’hui, je sens plus nettement que le Mainet représente seulement une partie de la légende des Enfances de Charles, que d’autres chants, perdus depuis des siècles, contenaient des faits que le Mainet néglige et que ces chants ont été utilisés par les remanieurs des Fils Aymon, mais que les personnages principaux ont leurs prototypes dans la légende mérovingienne.

  1. P. 307-309.