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les quatre fils aymon

Ot Renaus de Baiart les .ii. arçons coubrés ;
12230Grans cols se vont doner sor les escus listés.
Desor la boucle d’or les ont frais et quassés ;
Li hauberc sunt treslit, li espié amoré.
Rollans faut à Renaut, ne l’a point adesé,
Li espiés que il tint, feri enmi le pré ;
12235La hante en est brisie et li fers est remés.
Et Renaus fiert Rollans en l’escu d’or listé.
Desos la bocle d’or li a frait et troé,
Et le hauberc del dos rompu et dessafré.
Son espié li passa dejoste le costé ;
12240Mais ne l’a point en char touchié ne adesé.
Sa hante iest brisie ; li fers i est remés.
Rollans tint Durendart au poing d’or neelé,
Et Renaus trait Froberge de son senestre lé.
Amont, parmi les hiaumes, se sunt grant cop doné
12245Que les flors et les pieres en sunt jus avalé,
Et le fu et le flamme en font estinceler ;
L’erbe qui estoit verde, en covint alumer.[1]
Renaus, li fius Aymon, a Rollant apelé :
« Saves, sire Rollant, que je vos weil conter ?
12250Descendons des destriers, se croire me voles. »[2]
Et respondi Rollans : « Vos aves bien parlé.
Se perdions nos chevaus, jamais n’aurions tes. »
Et respondi Renaus : « Or aves bien parlé. »[3]
Lors descendent à terre li vasal, aduré.
M 322 12255Renaus tint haut Froberge, s’a Rollant regardé,
Et Rollans Durendart, seure li est alés.
« Renaut, or somes nos par igal, per à per ;[4]
Or devomes tant faire et nos cors esprover

  1. 12247 Hyperbole romanesque.
  2. 12250 L’auteur renonce à donner une réplique du combat des deux chevaux, soit qu’il lui pèse de faire tort à la réputation du coursier que Roland monte à Roncevaux, soit qu’il juge plus convenable de laisser Veillantin et Bayard en dehors de la lutte engagée entre les deux héros de l’épopée.
  3. 12253 B je l’otroie, en non Dé.
  4. 12257-12259 Ces trois vers manquent dans B. Le sentiment qu’ils expriment devait dégénérer en une fausse conception de l’honneur et tourner au romanesque. — Ms. parost.