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appendice

rédaction ou d’une révision générale du poème, de la plus ancienne qui nous soit parvenue.

Dans la version BC et dans celles qui s’en inspirent, les différences avec L pour cette partie du récit, sont purement de forme : le cadre est conforme à ce que l’on a dans L. C’est à partir de l’occupation de Montbendel jusqu’à l’épisode de Vaucouleurs que le fond diffère : prise de Montbendel par la force, épisode de la chasse, délibération du conseil du roi Ys, préparatifs de la trahison. Il semble bien qu’ici encore il y ait eu des tâtonnements pour établir le texte de L ; le feuillet, réglé à 70 lignes et comprenant à lui seul 418 vers, en paraît une trace. Mais il n’en reste pas moins très probable qu’à partir du feuillet 25 (v. 8593), toute indécision avait cessé.

Le passage du texte de L où l’emprunt à une autre version est le plus manifeste, se rencontre précisément dans la partie du manuscrit où l’on a encore des marques de l’hésitation du copiste, du feuillet 17, verso A, au feuillet 19 recto A, à la délibération des conseillers du roi Ys. L’on a là (5913-5922, Mich. P. 156, 27-36) une forme de la querelle de Renaud et de Charlemagne et de la mort de Bertolais qui dérive non du récit précédent de L. (1911-1946 ; Mich. P. 51, 19. P. 52, 15), mais de celui qui est commun à A P. Cette variante est reproduite plus loin dans L par Renaud lui-même (8610-8694 ; Mich. P. 227, 5-29. — 8. les notes aux vers 6020, 8609, 8625). Ainsi l’on a dans la version L une contradiction résultant du mélange de versions différentes, et l’état du manuscrit La Vallière en donnerait, à lui seul, une explication plausible.

La seconde section du ms. L ne comporte pas ici un long examen. Elle commence au feuillet 39 recto A (13666, Mich. P. 359, 20). La page est rayée à 65 lignes, l’écriture plus grosse, d’un caractère tout autre que dans le première section, de date beaucoup plus récente, ce qui d’ailleurs ne prouve pas contre l’antiquité de la version reproduite. Les négligences de toute sorte y abondent. Elle donne la plus ancienne des versions de la fin du poème, mais l’on peut supposer que ce poème finissait autrement, que la partie ainsi remplacée s’arrêtait plus tôt. On est d’abord surpris que le changement de manuscrit ait lieu précisément au point où il va être question de Tremoigne et du départ les Fils Aymon pour cette ville, mais l’on se rappelle que l’on a déjà au moins une fois le nom de Tremoigne dans L (6073, Mich., P.167, 33). Il est vrai que ce passage est suspect.

Tout pourrait se concilier si l’on admettait qu’un trouvère ait connu le nom de saint Reginald (ou Ranvald) et le culte dont il était honoré à Dortmund, qu’il l’ait confondu avec Renaud, qu’ainsi il l’ait mentionné au v. 6073 et que de cette simple mention aient dérivé dans la suite et le départ pour Tremoigne et la légende pieuse. Cette partie a été traitée par les remanieurs avec autant de liberté que le Beuves d’Aigremont. Elle mériterait une étude spéciale qui ne devrait pas se limiter au seul texte de La Vallière.