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Un bourgeois, un ouvrier, un paysan, se souciaient peu des choses que les connaisseurs regardaient comme des trouvailles. Tel cabinet, tel musée célèbre et telle bibliothèque d’un prix inestimable se formaient à la longue, sans onéreux sacrifices. Maintenant, la palme est aux princes et aux banquiers qui, le plus souvent, achètent des collections toutes faites, ou bien subventionnent des commis-voyageurs en bibelots. La curiosité est aux enchères ; elle devient à la mode.

L’amateur en question plus haut habitait, dans la rue des Boulangers, une maison voisine de la nôtre.

Là, cinq ou six chambres contenaient une collection unique de livres, de brochures, d’estampes, de statuettes, de médailles, de costumes révolutionnaires.

Il me sembla, quand je la visitai, que les monuments se relevaient, que les hommes sortaient du tombeau et allaient parler, que les pamphlets recommençaient à circuler.

Le propriétaire de cette collection, M. Maurin, lieutenant-colonel du génie en retraite, avait ramassé les miettes de « l’orgie révolutionnaire », avait porté défi au temps. Il m’offrit de venir travailler chez lui, à toute heure, comme il me conviendrait, pour mettre en ordre ces matériaux.