Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/466

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les malheureux, n’aient pas l’instinct ou la fierté de l’éléphant, qui ne se reproduit point dans la servitude.

— Dans la lutte éternelle que la société amène entre le pauvre et le riche, le noble et le plébéien, l’homme accrédité et l’homme inconnu, il y a deux observations à faire. La première est que leurs actions, leurs discours sont évalués à des mesures différentes, à des poids différens, l’une d’une livre, l’autre de dix ou de cent, disproportion convenue, et dont on part comme d’une chose arrêtée : et cela même est horrible. Cette acception de personnes, autorisée par la loi et par l’usage, est un des vices énormes de la société, qui suffirait seul pour expliquer tous ses vices. L’autre observation est qu’en partant même de cette inégalité, il se fait ensuite une autre malversation ; c’est qu’on diminue la livre du pauvre, du plébéien, qu’on la réduit à un quart ; tandis qu’on porte à cent livres les dix livres du riche ou du noble, à mille ses cent livres, etc. C’est l’effet naturel et nécessaire de leur position respective : le pauvre et le plébéien ayant pour envieux tous leurs égaux ; et le riche, le noble, ayant pour appuis et pour complices le petit nombre des siens qui le secondent pour partager ses avantages et en obtenir de pareils.

— Qu’est-ce que c’est qu’un cardinal ? C’est un prêtre habillé de rouge, qui a cent mille écus du roi, pour se moquer de lui au nom du pape.