Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/121

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1 lO OEUVRES

l’on croie que l’on serait heureux si on y allait?

M. de, après un instant de silence, répondit :

« Cela est vrai, et c’est ce qui a fait la fortune du paradis. »

— Milton, après le rétablissement de Char- les II, était dans le cas de reprendre une place très- lucrative qu’il avait perdue ; sa femme l’y exhor- tait ; il lui répondit : « Vous êtes femme, et vous voulez avoir un carosse ; moi, je veux vivre et mourir en honnête homme. »

— Je pressais M. de L d’oublier les torts de

M. de B qui l’avait autrefois obligé ; il me ré- pondit : (c Dieu a recommandé le pardon des in- jures ; il n’a point recommandé celui des bien- faits. »

— M me disait : « Je ne regarde le roi de

France que comme le roi d’environ cent mille hommes, auxquels il partage et sacrifie la sueur, le sang et les dépouilles de vingt-quatre millions neuf cents mille hommes, dans des proportions déterminées par ies idées féodales, militaires, anti-morales et anti-politiques qui avilissent l’Eu- rope depuis vingt siècles. »

— M. de Calonne, voulant introduire des fem- mes dans son cabinet, trouva que la clef n’entrait point dans la serrure. Il lâcha un f. d’impa- tience ; et, sentant sa faute : « Pardon, mesdames, dit-il! j’ai fait bien des affaires dans ma vie, et j’ai vu qu’il n’y a qu’un mot qui serve. » En effet, la clef entra tout de suite.