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Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t5.djvu/266

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gaîté nécessaire k voire santé. Quand un sentiment profond vous rendrait heureux, du moins est-il cer- tain qu'il ne vous délasserait pas , et \x)us avez be- soin d'être délassé. Xe craignez pas de perdre par là cette sensibilité nécessaire à l'homme de lettres ; vous en avez reçu une trop grande dose : rien ne peut l'épuiser. La lecture des excellens livres l'en- tretiendra davantage, sans exposer votre âme à ces secousses violentes qui l'accablent, lorsque des nœuds qui nous étaient chers viennent à se briser.

Ne donnez jamais à personne aucun droit sur vous. La roideur de votre caractère pouvant par la suite vous forcer à cesser de les voir, vous aurez l'air de l'ingratitude. Tenez tout le monde po- liment à une grande distance. Prosternez-vous pour refuser. Je crois à l'amitié, je crois à l'a- mour : cette idée est nécessaire à mon bonheur : mais je crois encore plus que la sagesse ordonne de renoncer à l'espérance de trouver une mai- tresse et un ami capables de remplir mon cœur. Je sais c[ue ce que je vous dis fait frémir : mais telle est la dépravation humaine , telles sont les raisons que j'ai de mépriser les hommes, que je me crois tout à fait excusable.

Si quelqu'un était naturellement ce que je vous conseille d'être , je le fuirais de tout mon cœur. Est-on privé de sensibilité ? on inspire un senti- ment qui ressemble à l'aversion ; est-on trop sen- sible? on est malheureux. Quel parti prendre? celui de réduire l'amour au plaisir d^ satisfaire

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