Les Voyages de Champlain. 7
vaiiTeaux : l’vn du port de 120. tonneaux, dans lequel commandoit le ileur de Pont-graué : & l’autre de 150. où il fe mit auec pluiieurs gentilshommes. Le feptiefme d’Auril mil iix cens quatre, nous partifmes du Haure de grâce, & Pont-graué le 10. qui auoit le rendes-vous à Canceau(i) 20. lieuës du cap Breton(2). Mais comme nous fufmes en pleine mer le fieur de Mons changea d’aduis & prit fa route vers le port au Mouton, à caufe qu’il eft plus au midy, & auiîi plus commode pour aborder, que non pas Canceau. ’
Le premier de May nous eufmes cognoiiTance de l’ifle de Sable, où nous courufmes rifque d’eftre perduz par la faute de nos pilotes qui s’eftoient trompez en l’eftime qu’ils firent plus de l’auant que nous n’eftions de 40. lieuës.
Cefte ifle eft eiloignée de la terre du cap Breton de 30. lieuës, nort & fu, & contient enuiron 15. lieuës. Il y a vn petit lac. L’ifle eft fort fablonneufe & n’y a point de bois de haute futaie, fe ne font que taillis & herbages que pafturent des bœufz & des vaches que les Portugais y portèrent il y a plus de 60. ans, qui feruirent beaucoup aux gens du Marquis de la Roche : qui en plufieurs années qu’ils y feiournerent prirent grande quantité de fort beaux renards noirs, dont ils conferuerent bien foigneufement les peaux. Il y a force loups marins de la peau (1) Ce mot, que les Anglois écrivent Canso, est d’origine sauvage, suivant Lescarbot. (2) Il s’agit ici du cap qui a donné son nom à l’île du Cap-Breton. « En cette « terre, » dit Thévet (Grand Insulaire), « il y a vne prouince nommée Campeftre de « Berge, qui tire au Sud-Eil : en celle prouince gill à l’eft le cap ou promontoire de « Lorraine, ainli par nous nommé ; & autres lui ont donné le nom de Cap des Bretons, « à caufe que c’elî là que les Bretons, Bifcaïns & Normands vont & coiloyent allans en « terre-neuue pour pefcher des moluës. » 1604.
>55
