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César Franck et son école, en particulier Vincent d’Indy, ont subi pendant une courte période l’influence du romantisme allemand où ils puisaient des sujets de compositions symphoniques et écoutaient les échos de la « gorge aux Loups » du Freyschütz. Franck lui-même donnait, en 1882, le Chasseur maudit, d’après une ballade de Bürger, page vigoureuse et pittoresque, où s’opposent avec une force symbolique le cor d’une chasse sacrilège et les cloches qui appellent à la prière, avant que l’obstination impie du chasseur qui viole la sainteté du dimanche ne le voue à la malédiction et à l’Enfer[1].

Il avait été précédé de cinq ans par la Lénore où le rare musicien que fut Henri Duparc interprète une légende de Bürger[2] où il y a aussi une chasse fantastique, mais sans symbole.

Cette phase d’influence germanique fut peut-être pour Vincent d’Indy sa meilleure époque, puisqu’il lui doit, outre le Chant de la Cloche, son Wallenstein, « trilogie » symphonique d’après le drame de Schiller[3]. Comme, la veille, dans Lénore et, le lendemain, dans le Chasseur maudit, il y a une chevauchée fabuleuse dans sa Forêt enchantée (1878) d’après Uhland. Cela fait beaucoup de galops nocturnes en si peu d’années chez trois artistes du même groupe. Une telle répétition nous montre les compositeurs de poèmes symphoniques exposés à l’abus du poncif. Pittoresque et mouvementée dans la peinture du « Camp de Wallenstein », fervente pour chanter les amours de « Max et Thecla », grave à la « Mort de Wallenstein », la trilogie de Vincent d’Indy est une de ses œuvres les

  1. Quelle que soit leur valeur, les autres œuvres pour orchestre de César Franck, malgré leur titre de « poème symphonique », n’en sont pas. Les Éolides, d’après Leconte de Ljisle, et les Djinns, d’après Victor Hugo (d’Indy lui-même, dans son livre si chaleureux sur Franck ne les donne que comme une ébauche des Variations symphoniques), ne sont que des tableaux, d’une imagination un peu pesante. La division de Psyché en trois parties, où interviennent des chœurs, exclut cette poétique méditation du « poème symphonique ».
  2. Dont Raff avait déjà tiré une symphonie en quatre parties.
  3. Sujet déjà traité en musique par Rheinsberger.