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Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/16

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suis heureuse. N’empêche que nous étonnons tous ceux qui nous connaissent…

— Ah !

— Ils disent que nous ne sommes pas de notre temps.

— Je n’avais jamais pensé à cela, fit-il songeur.

— Laissons-les dire.

Elle suivit Georges jusqu’à la porte.

— Attends que je t’embrasse, dit-elle.

Jeanne était inséparable de l’idée que Georges se faisait du bonheur. Les femmes avaient tenu peu de place dans sa vie avant son mariage. Ce qui le frappait quand il se rappelait les noms des jeunes filles qu’il avait connues (à l’occasion d’une nouvelle concernant leur mari ou un de leurs enfants dans le journal) c’est que le sentiment éprouvé pour celles qui avaient un peu compté, avait été très fort au début, allant ensuite en décroissant jusqu’à ce que leurs relations deviennent une charge. Aucune ne l’avait attaché avant Jeanne. Il était trop sérieux, trop pris par ses études, ou il manquait des moyens qui eussent été nécessaires pour rejoindre celles qu’il aurait pu aimer. À tout prendre il avait connu plus d’héroïnes de rêves que de jeunes filles en chair et en os. Son mariage l’avait comblé.