Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/273

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rapproché et confondu l’idée socialiste et le mouvement ouvrier. Dans le premier tiers du dix-neuvième siècle, la force ouvrière s’exerçait, se déployait, luttait contre la puissance écrasante du capital : mais elle n’avait pas conscience du terme où elle tendait ; elle ne savait pas que, dans la forme communiste de la propriété, était l’achèvement de son effort, l’accomplissement de sa tendance. Et, d’autre part, le socialisme ne savait point que, dans le mouvement de la classe ouvrière, était sa réalisation vivante, sa force concrète et historique. La gloire de Marx est d’avoir été le plus net, le plus puissant de ceux qui mirent fin à ce qu’il y avait d’empirisme dans le mouvement ouvrier, à ce qu’il y avait d’utopisme dans la pensée socialiste. Par une application souveraine de la méthode hégélienne, il unifia l’idée et le fait, la pensée et l’histoire. Il mit l’idée dans le mouvement et le mouvement dans l’idée, la pensée socialiste dans la vie prolétarienne, la vie prolétarienne dans la pensée socialiste. Désormais, le socialisme et le prolétariat sont inséparables : le socialisme ne réalisera toute son idée que par la victoire du prolétariat ; et le prolétariat ne réalisera tout son être que par la victoire du socialisme.

À la question toujours plus impérieuse : comment se réalisera le socialisme ? il convient donc d’abord