Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/312

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puéril d’attendre qu’un cataclysme économique menaçant le prolétariat dans sa vie même provoque, sous la révolte de l’instinct vital, « l’effondrement violent de la bourgeoisie ». Ainsi, les deux hypothèses, l’une historique, l’autre économique, d’où devait sortir, dans la pensée du Manifeste communiste, la soudaine Révolution prolétarienne, la Révolution de dictature ouvrière, sont également ruinées.

Ni il n’y aura dans l’ordre politique une révolution bourgeoise que le prolétariat révolutionnaire puisse soudain chevaucher ; ni il n’y aura dans l’ordre économique un cataclysme, une catastrophe qui, sur les ruines du capitalisme effondré, suscite en un jour la domination de classe du prolétariat communiste et un système nouveau de production. Ces hypothèses n’ont pas été vaines. Si le prolétariat n’a pu se saisir d’aucune des révolutions bourgeoises, il s’est poussé cependant depuis cent vingt années à travers les agitations de la bourgeoisie révolutionnaire, et il continuera encore, sous les formes nouvelles que développe la démocratie, à tirer parti des inévitables conflits intérieurs de la bourgeoisie. S’il n’y a pas eu réaction totale et révolutionnaire de l’instinct vital du prolétariat sous un cataclysme total du capitalisme, il y a eu d’innombrables crises qui, en attestant le désordre intime de