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ardente, que les propriétaires voisins accourent pour aider à lier en gerbes ces épis, à former des tas de dix gerbes, puis à charger ces tas sur les grandes charrettes et à bâtir le gerbier. Des métayers aux petits propriétaires paysans, il y a le même échange de services. Et il n’y a pas seulement prêt mutuel du travail des bras, il y a prêt du bétail. La machine à moissonner ayant rapidement abattu le blé, il faut, de peur des orages, le lier vite, et vite l’entasser en gerbier. Pour hâter ce travail urgent, les paysans se prêtent charrettes et bœufs. Et, je le répète, il n’y a pas de compte ouvert. Il serait impossible d’évaluer les services de l’un et ceux de l’autre. C’est un libre et amical échange. Ainsi, une parcelle d’âme communiste pénètre dans le travail paysan, dans la conscience paysanne. Et cela dure jusqu’à ce que la batteuse ait, dans le rayon où se sont formés spontanément ces groupes, dévoré le dernier gerbier.

Certes, jamais les socialistes n’ont prétendu faire entrer de force la propriété paysanne dans le cadre communiste. Nos aînés, nos maîtres ont toujours dit que seul l’exemple de la grande production agricole entraînerait les propriétaires paysans à abandonner la culture parcellaire, la propriété morcelée. Mais cela même est insuffisant, et nous