Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/467

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propriétaire ne forme une classe qu’à l’égard des salariés. En elle-même, elle est divisée, déchirée par la plus âpre concurrence. Elle n’est point parvenue à s’organiser, et par conséquent à discipliner la production, à la régler selon les besoins variables des sociétés. Et dans ce désordre anarchique, elle n’est avertie de ses erreurs que par des crises dont le prolétariat porte souvent les terribles conséquences. Ainsi, par une iniquité suprême, les prolétaires sont socialement responsables de la marche de la production, qu’en aucune manière ils ne déterminent. N’être pas libre et être responsable, n’être même pas consulté et être châtié, voilà le destin paradoxal du prolétariat dans le désordre capitaliste. Et si le capitalisme s’organisait, s’il parvenait par de vastes trusts à régler la production, il ne pourrait la régler qu’à son profit ; il abuserait de cette puissance d’unité pour imposer à la communauté des acheteurs des prix d’usure ; et les travailleurs n’échapperaient aux conséquences du désordre économique que pour tomber sous le coup du monopole.


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Toutes ces misères, toutes ces injustices et tous ces désordres viennent de ce qu’en fait une classe monopolise les moyens de production et de vie, et