Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/469

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Et qu’on ne s’étonne point qu’ayant revendiqué d’abord la liberté de la personne humaine, nous fassions intervenir maintenant la communauté nationale. Il n’y a que la nation qui puisse affranchir tous les individus. Il n’y a que la nation qui puisse fournir à tous des moyens de libre développement. Les associations particulières, restreintes, temporaires, peuvent protéger pour un temps des groupes restreints d’individus. Mais il n’y a qu’une association générale et permanente qui puisse assurer le droit de tous les individus sans exception, et non pas seulement des individus vivants, mais de tous ceux qui sont à naître, dans la suite des générations.

Or, cette association universelle, impérissable, qui comprend, sur une portion déterminée de la planète, tous les individus, et qui étend son action et sa pensée aux générations successives, c’est la nation. Et si nous invoquons la nation, c’est pour assurer la plénitude et l’universalité du droit individuel. Aucune personne humaine, dans aucun moment de la durée, ne doit être laissée en dehors de la sphère du droit. Aucune ne doit être exposée à être la proie ou l’instrument d’une autre personne. Aucune ne doit être privée des moyens positifs de travailler librement, sans dépendance servile à l’égard de qui que ce soit.