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qu’on répète en chantant on ne sait pas davantage pourquoi, qu’on échange aujourd’hui avec celle d’hier et qu’on oubliera demain sans savoir pourquoi, qui résonne mélancoliquement quand nous sommes tristes, qui résonne gaîment quand nous sommes gais, et que nous chantonnons cependant toujours sans savoir pourquoi.

C’est à cette mélodie que s’attaquait Rossini, et c’est ainsi, ô merveille, que le secret de l’opéra fut découvert ! Ce que la réflexion et la spéculation esthétique avaient édifié, les mélodies de Rossini le démolirent aussi aisément qu’une toile d’araignée. Le sort de l’opéra « dramatique » fut analogue à celui de ces problèmes scientifiques qui reposent sur une conception fausse et que les études les plus profondes ne peuvent que rendre plus insolubles, jusqu’à ce qu’enfin l’épée d’Alexandre accomplisse son œuvre, qu’elle tranche le nœud par le milieu, qu’elle en disperse les fragments en tous sens. Cette épée d’Alexandre fut précisément celle dont Rossini se servit ; il trancha, lui aussi, le nœud, quand il rendit le public du monde entier témoin de cette vérité évidente : que les gens voulaient simplement entendre de « jolies mélodies » et que les artistes