Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/158

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N’aymer poinct, regarder de mauvais œil, comme un monstre, celuy qui est d’autre opinion que la leur, penser estre contaminé de parler ou hanter avec luy, c’est la plus douce et plus molle action de ces gens : qui est homme de bien par scrupule et bride religieuse, gardez-vous-en, et ne l’estimez gueres. Ce n’est pas que la religion enseigne ou favorise aucunement le mal, comme aucuns ou trop sottement, ou trop malicieusement, voudroient objecter et tirer de ces propos ; car la plus absurde et la plus faulse mesme ne le faict pas : mais cela vient que n’ayant aucun goust, ny image, ou conception de preud’homie, qu’ à la suite et pour le service de la religion, et pensant qu’estre homme de bien n’est autre chose qu’estre soigneux d’advancer et faire valoir sa religion, croyent que toute chose, quelle qu’elle soit, trahison, perfidie, sedition, rebellion, et toute offense à quiconque soit, est non seulement loysible et permise, colorée du zele et soin de religion, mais encore loüable, meritoire, et canonizable, si elle sert au progrez et advancement de la religion, et reculement de ses