Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/176

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Autres disent la prosperité, laquelle, par son rire et ses mignardes douceurs, agist d’aguet, relasche et ramollit l’esprit et luy desrobe insensiblement sa trempe, sa force et vigueur, comme Dalila à Samson, tellement que plusieurs, durs, opiniastres et invincibles à l’adversité, se sont laissez aller aux flatteries de la prosperité : (…) ; et puis l’affliction incite mesme nos ennemis à pitié, la prosperité esmeut nos amis à envie. Item, en l’adversité se voyant tombé et abandonné de tous, et que toute l’esperance est reduicte à soy-mesme, l’on prend courage, l’on se releve, se ramasse, l’on s’esvertue de toute sa force ; et en la prosperité se voyant assisté de tous qui rient et applaudissent, l’on se relasche, l’on se rend nonchalant, l’on se fie à tous sans apprehension de mal et difficulté, et pense