Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/184

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Les afflictions et adversitez viennent de trois endroicts : ce sont trois autheurs et ouvriers des peines ; le peché, premier inventeur qui les a mis en nature ; l’ire et la justice divine, qui les met en besongne, comme ses commissaires et executeurs ; la police du monde troublée, alterée par le peché, en laquelle, comme une revolte generalle et tumulte civil, les choses n’estant en leurs places deuës, et ne faisant leurs offices, sourdent tous maux, ainsi qu’au corps le denouement des membres, le froissement et dislocation des os apporte des douleurs grandes et inquietudes. Ces trois ne nous sont poinct propices ny favorables : le premier est à hayr du tout comme ennemy, le second est à craindre et redoubter comme terrible, le tiers est à s’en garder comme abuseur. Pour se sauver et se deffaire de tous trois, il n’est que d’employer leurs propres armes, desquelles ils nous battent, comme Goliath de son propre cousteau, faisant de necessité vertu, profict de l’affliction et de la peine, la faisant rejalir contr’eux. L’affliction, vraye engeance de peché, bien prinse, est sa mort et sa ruine, et faict à son autheur ce que la vipere à sa mere qui la produict : c’est l’huile du scorpion qui guarist sa morsure, affin qu’il perisse par son invention : (…). C’est la lime de l’ame qui la