Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/206

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de la musique celeste et des mouvemens divers des ciels roulans et s’entrefrottans l’un l’autre. Bref (et c’est le principal fruict d’icelle) elle vainc toute difficulté, rend les choses aisées, qui sembloient impossibles, adoucit toute aigreur, dont par son moyen l’on vit content par-tout : mais elle maistrise nos ames, nos creances, nos jugemens, d’une très injuste et tyrannique authorité. Elle faict et deffaict, authorise et desauthorise tout ce qu’il luy plaist sans rithme ny raison, voire souvent contre toute raison : elle faict valoir et establit parmy le monde, contre raison et jugement, toutes les opinions, religions, creances, observances, mœurs et manieres de vivre les plus fantasques et farouches, comme a esté touché cy-dessus. Et au rebours elle degrade injurieusement, ravalle et desrobe aux choses vrayement grandes et admirables leur prix, leur estimation, et les rend viles (…). C’est donc une très grande et puissante chose que la coustume. Platon ayant reprins un enfant de ce qu’il jouoit aux noix, et qu’il luy avoit respondu, tu me tances pour peu de chose, dict, la coustume n’est pas peu