Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/270

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pour crime de desertion ; car l’on ne doibt abandonner sa garnison sans l’exprès commandement de celuy qui nous y a mis : nous ne sommes icy pour nous seuls, ny maistres de nous-mesmes. Cecy donc n’est pas sans dispute ny sans doubte : bien peust-on, peust-estre, dire qu’il ne faut pas entendre à ce dernier exploict sans très grande et très juste raison ; affin que ce soit comme ils disent (…), une honneste et raisonnable issue et departie. Ce ne doibt donc pas estre pour une legere occasion, quoy que disent aucuns que l’on peust mourir pour causes legeres, puis que celles qui nous tiennent en vie ne sont gueres fortes : c’est ingratitude à nature ne vouloir user de son present ; c’est signe de legereté et d’estre trop chagrin et difficile, de s’en aller et rompre compagnie pour peu de chose ; mais pour une grande et puissante, et icelle juste et legitime, comme par exemple, ainsi qu’a esté dict, un très douloureux et insupportable vivre, ou une mort très cruelle et honteuse. Parquoy ne semblent avoir eu suffisante excuse, ny cause assez juste en leur mort, tous ceux-cy : Pomponius Atticus, Marcellinus et Cleantes, dont a esté parlé, qui n’ont voulu arrester le cours de leur mort, pour ceste seule consideration, qu’ils s’y trouvoient desia presque à mesme : ces femmes de Paetus,