Page:Chateaubriand - Œuvres complètes - Génie du christianisme, 1828.djvu/720

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ne serait que justice de supposer qu’il a peut-être aussi bien vu son sujet que le critique qui, sur une lecture rapide, condamne d’un mot un plan médité pendant des années. Que l’on donne toute autre forme au Génie du Christianisme, et l’on ose assurer que l’ensemble des beautés de la religion, l’accumulation des preuves aux derniers chapitres, la force de la conclusion générale, auront beaucoup moins d’éclat et seront beaucoup moins frappants que dans l’ordre où le livre est actuellement disposé. On ose encore avancer qu’il n’y a point de grand monument en prose dans la langue française (le Télémaque et les ouvrages historiques exceptés) dont le plan ne soit exposé à autant d’objections que l’on en peut faire au plan de l’auteur. Que d’arbitraire dans la distribution des parties et des sujets de nos livres les plus beaux et les plus utiles ! Et certainement (si l’on peut comparer un chef-d’œuvre à une œuvre très imparfaite), l’admirable Esprit des Lois est une composition qui n’a peut-être pas plus de régularité que l’ouvrage dont on essaye de justifier le plan dans cette défense. Toutefois la méthode était encore plus nécessaire au sujet traité par Montesquieu qu’à celui dont l’auteur du Génie du Christianisme a tenté une si faible ébauche.

Détails de l’ouvrage.

Venons maintenant aux critiques de détail.

On ne peut s’empêcher d’observer d’abord que la plupart de ces critiques tombent sur le premier et sur le second volume. Les censeurs ont marqué un singulier dégoût pour le troisième et le quatrième. Ils les passent presque toujours sous silence. L’auteur doit-il s’en attrister ou s’en réjouir ? Serait-ce qu’il n’y a rien à redire sur ces deux volumes, ou qu’ils ne laissent rien à dire ?

On s’est donc presque uniquement attaché à combattre quelques opinions littéraires particulières à l’auteur et répandues dans le second volume[1], opinions qui, après tout, sont d’une petite importance, et qui peuvent être reçues ou rejetées sans qu’on en puisse rien conclure contre le fond de l’ouvrage ; il faut ajouter à la liste de ces graves reproches une douzaine d’expressions véritablement répréhensibles, et que l’on a fait disparaître dans les nouvelles éditions.

Quant à quelques phrases dont on a détourné le sens (par un art si merveilleux et si nouveau) pour y trouver d’indécentes allusions,

  1. Encore n’a-t-on fait que répéter les observations judicieuses et polies qui avaient paru à ce sujet dans quelques journaux accrédités. (N.d.A.)