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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

d’images ; sa statue colossale, par Canova, décorait l’escalier du duc de Wellington. N’aurait-on pu consacrer un autre sanctuaire à Mars enchaîné ? Cette déification semble plutôt l’œuvre de la vanité d’un concierge que de l’honneur d’un guerrier. — Général, vous n’avez point vaincu Napoléon à Waterloo, vous avez seulement faussé le dernier anneau d’un destin déjà brisé[1].


Après ma présentation officielle à George IV, je le vis plusieurs fois. La reconnaissance des colonies espagnoles par l’Angleterre était à peu près décidée ; du moins les vaisseaux de ces États indépendants paraissaient devoir être reçus sous leur pavillon dans les ports de l’empire britannique. Ma dépêche du 7 mai rend compte d’une conversation que j’avais eue avec lord Londonderry, et des idées de ce ministre, cette dépêche, importante pour les affaires d’alors, serait presque sans intérêt pour le lecteur d’aujourd’hui. Deux choses étaient à distinguer dans la position des colonies espagnoles relativement à l’Angleterre et à la France : les intérêts commerciaux et les intérêts politiques. J’entre dans les détails de ces intérêts. « Plus je vois le marquis de Londonderry, disais-je à M. de Montmorency, plus je lui trouve de finesse.

  1. « Cette apostrophe au duc de Wellington, dit M. de Marcellus (Chateaubriand et son temps, p. 272), me rappelle que, dans sa colère contre la statue que les ladies fashionnables dressèrent par souscription, œre feminino, au héros représenté sous les traits d’un Achille jeune et à demi-nu, M. de Chateaubriand me dit comme nous passions un jour dans ce coin de Hyde-Park : « Non, il n’a battu que le maréchal Soult ; il n’a point vaincu l’invincible, et il n’a été à Waterloo que l’exécuteur de la justice divine. »