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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

drais patience comme avait fait son cher Bremond. Ce qui fut dit fut fait .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .   Le soir, nous la ramenâmes chez elle. Tout en causant, je vis deux pistolets sur sa toilette. « Ah ! ah ! dis-je en en prenant un, voici une boîte à mouches de nouvelle fabrique ; pourrait-on savoir quel en est l’usage ? » .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .   Elle nous dit avec une naïveté fière qui la rendait encore plus charmante : « Quand j’ai des bontés pour des gens que je n’aime point, je leur fais payer l’ennui qu’ils me donnent : rien n’est plus juste : mais, en endurant leurs caresses, je ne veux pas endurer leurs insultes, et je ne manquerai pas le premier qui me manquera. »

« En la quittant j’avais pris son heure pour le lendemain. Je ne la fis pas attendre. Je la trouvai in vestito di confidenza, dans un déshabillé plus que galant, qu’on ne connaît que dans les pays méridionaux, et que je ne m’amuserai pas à décrire, quoique je me le rappelle trop bien .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .   Je n’avais point d’idée des voluptés qui m’attendaient. J’ai parlé de madame de L…e, dans les transports que son souvenir me rend quelquefois encore ; mais qu’elle était laide, et vieille, et froide, auprès de ma Zulietta ! Ne tâchez d’imaginer les grâces et les charmes de cette fille enchanteresse, vous resteriez trop loin de la vérité ; les jeunes vierges des cloîtres sont moins fraîches, les beautés du sérail sont moins vives, les houris du paradis sont moins piquantes. »

Cette aventure finit par une bizarrerie de Rousseau