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VIE DE RANCÉ

Perseigne, arrivèrent et prirent possession de la Trappe.

Un accident survenu le 1er novembre 1662 contribua à fixer la résolution de Rancé. Sa chambre, dans le monastère qu’il avait achevé de réparer, s’écroula et pensa l’écraser : « Voilà, s’écria-t-il, ce que c’est que la vie ! » Il se retira aussitôt dans un coin de l’église. Il entendit chanter le psaume : Qui confidunt in Domino. Frappé d’une lumière soudaine, il se dit : « Pourquoi craindrais-je de m’engager dans la profession monastique ! » Les difficultés de son esprit s’évanouirent.

Il partit pour Paris, afin de demander au roi la permission de tenir en règle l’abbaye de la Trappe. Quelques hommes saints essayèrent de le détourner de sa résolution ; mais il dit à l’abbé de Prières, vicaire général de l’Étroite Observance : « Je ne vois point d’autre porte à laquelle je puisse frapper pour retourner à Dieu que celle du cloître ; je n’ai d’autre ressource, après tant de désordre, que de me revêtir d’un sac et d’un cilice en repassant mes jours dans l’amertume de mon cœur. »

L’abbé lui répondit : « Je ne sais, monsieur, si vous comprenez bien ce que vous demandez : nescis quid petis. Vous êtes prêtre, docteur de