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LIVRE TROISIÈME

M. Dumont, auteur de l’histoire de la ville de Commercy, a bien voulu m’envoyer une lettre de Rancé au cardinal de Retz. « Si Votre Éminence, dit l’abbé de la Trappe, croyait qu’il n’y eût personne dans le monde dont mon cœur fût plus occupé que d’elle, elle ne me ferait pas justice. » Voilà où la déférence pour les rangs peut conduire la piété même. Après sa sortie, Rancé se hâta de se replier et de rappeler du monde sa patrouille. Revenu à la Trappe, il admit à profession frère Pacôme : celui-ci n’ouvrit jamais un livre, mais il excellait dans l’humilité. Chargé du soin des pauvres, il n’entrait dans le lieu où il mettait le pain qu’après s’être déchaussé, comme Moïse pour entrer dans la terre promise. Pacôme attira à lui un de ses frères ; ils vécurent sous le même toit sans se donner la moindre marque qu’ils se fussent jamais connus.

Rancé avait envoyé un religieux à Septfonts : ce religieux se gâta. « Je me suis mécompté, écrivait Rancé au visiteur, j’en ferai pénitence toute ma vie. »

La plupart des repentants du seizième siècle et du commencement du dix-septième avaient été des bandits ; ils ne se transformèrent pas, comme les massacreurs de septembre, en marchands de