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VIE DE RANCÉ

arriva où il plut au Père des miséricordes de se tourner vers moi. Je vis à la naissance du jour le monstre infernal avec lequel j’avais vécu ; la frayeur dont je fus saisi à cette terrible vue fut si prodigieuse que je ne puis croire que j’en revienne de ma vie. »

Rancé eut recours à la pénitence : la mère Louise, religieuse de la Visitation de Tours, lui indiqua pour directeur le Père Séguenot.

Cette mère Louise était Louise Roger de la Mardelière, appelée la belle Louison. « Louison, dit mademoiselle de Montpensier parlant de son enfance, était brune, bien faite, agréable de visage et de beaucoup d’esprit. Je dis à madame de Saint-Georges : « Si Louison n’est pas sage, je ne la veux point voir, quoique mon papa l’aime. » Madame de Saint-Georges me répondit qu’elle l’était tout à fait. »

C’était à cette mère Louise que Rancé s’adressa d’abord. Partout, dans le changement de mœurs qui s’opérait, des pénitentes échappées du monde avaient dressé des embûches pour s’emparer des repentirs, comme il y avait des pécheresses qui cherchaient à retenir les déserteurs. À la Visitation se trouvaient les écueils d’une première existence : la mère Louise possédait plus de deux