Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/119

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Ma sœur, dit-il, je consens pleinement,
d’accord avec l’avis de tout mon parlement,
que ce gentil Palamon, votre chevalier
qui vous sert avec sa pensée, son cœur et ses forces,
et toujours vous a servi depuis le jour que vous l’avez connu,
3080 vous le preniez en grâce et compassion,
et l’acceptiez comme époux et seigneur.
Donnez-moi votre main, car c’est nous qui faisons cet accord.
Laissez voir ici votre pitié féminine.
Il est fils d’un frère de roi, ma foi ;
mais s’il était un pauvre bachelier,
puisqu’il vous a servi tant d’années
et a eu pour vous tant d’adversité,
il faudrait en tenir compte, j’imagine ;
car douce pitié doit surpasser droit. »

3090Puis il parla à Palamon comme ci :
« Je crois que point n’est besoin de beaucoup sermonner
pour vous faire consentir à ceci.
Approchez et prenez par la main votre dame. »

Entre eux bientôt fut noué le lien
qu’on appelle matrimoine ou mariage
devant le conseil et tout le baronage.
Et ainsi à la joie de tous et au chant des musiques
Palamon a épousé Émilie.
Et Dieu qui a fabriqué tout ce vaste monde
3100 lui envoya sa maîtresse qu’il avait chèrement gagnée.

À présent Palamon est dans le bonheur,
vivant en allégresse, en richesse et en santé ;
et Émilie l’aime très tendrement,
et il la sert aussi chevalereusement,
si bien que jamais il n’y eut de mot entre eux
de jalousie ou d’autre grief.
Ainsi finit « Palamon et Émilie »,
et Dieu garde toute cette honnête compagnie ! Amen.

Ici finit le conte du Chevalier.