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[205]

De s'être, en cheveux gris, avisé de sa verve ;

Si l'on peut nommer verve une démangeaison

Qui fait honte à la rime, ainsi qu'à la raison.

Et, malheureusement, ce qui vicie abonde.

Du torrent de ses vers sans cesse il nous inonde. [210]

Tout le premier lui-même, il en raille, il en rit.

Grimace ! L'auteur perce ; il les lit, les relit,

Prétend qu'ils fassent rire ; et, pour peu qu'on en rie,

Le poignard sur la gorge, en fait prendre copie,

Rentre en fougue, s'acharne impitoyablement, [215]

Et, charmé du flatteur, le paye en l'assommant.

DORANTE

Oh ! Je suis patient, je veux lasser votre homme ;

Et que de l'encensoir ce soit moi qui l'assomme.

DAMIS

Pour moi je meurs, je tombe, écrasé sous le faix.

DORANTE

Qui vous retient chez lui ?

DAMIS

Des raisons que je tais ; [220]

Et je m'y plairais fort, sans sa muse funeste

Dont le poison maudit nous glace et nous empeste.


Heureux, quand mon esprit vole à sa région,

S'il n'y porte pas l'air de la contagion !

Le voici. Tout le corps me frissonne à l'approche [225]

Du griffonnage affreux qu'il a toujours en poche.



Scène IV

Francaleu, Dorante, Damis.
FRANCALEU

Peste soit de ces coups où l'on ne s'attend pas !

Voilà ma pièce au diable, et mon théâtre à bas.

DAMIS

Comment donc ?

FRANCALEU

Trois acteurs : l'amant, l'oncle, le père,

Manquant à point nommé, font cette belle affaire. [230]

L'un est inoculé ; l'autre, aux eaux ; l'autre, mort.

C'est bien prendre son temps !

DAMIS

Le dernier a grand tort.

FRANCALEU