S'il fallait à tout autre unir ma destinée.
Non, vous n'userez pas de tout votre pouvoir,
Mon père ! Accordons mieux mon coeur et mon devoir.
Arrachez-moi du monde à qui j'étais rendue !
Hélas ! Il n'a brillé qu'un instant à ma vue. [2230]
Je fermerai les yeux sur ce qu'il a d'attraits.
Puisse le ciel m'y rendre insensible à jamais !
La sotte chose en nous, que l'amour paternelle !
Ne suis-je pas déjà prêt à pleurer comme elle ?
Eh ! Laissez-vous aller à ce doux mouvement, [2235]
Monsieur ! Ayez pitié d'elle et de son amant.
Je ne vous rejoignais, après ma lettre lue,
Que pour servir Dorante à qui Lucile est due.
Laissez là ma fortune, et ne songez qu'à lui.
Votre ennemi mortel ! Qui voulait aujourd'hui... [2240]
Souffrez que ma vengeance à cela se termine.
Mais c'est le fils d'un homme ardent à ma ruine...
Non. Voilà qui met fin à vos inimitiés.
Scène IX
Écoutez-moi, monsieur ; ou je meurs à vos pieds,
Après avoir percé le coeur de ce perfide ! [2245]
Il est temps que je rompe un silence timide.
J'adore votre fille. Arbitre de mon sort,
Vous tenez en vos mains et ma vie et ma mort.
Prononcez, et souffrez cependant que j'espère.
Un malheureux procès vous brouille avec mon père. [2250]
Mais vous fûtes amis : il m'aime tendrement ;
Le procès finirait par son désistement.
Je cours donc me jeter à ses pieds comme aux vôtres,
Faire, à vos intérêts, immoler tous les nôtres,
Vous réunir tous deux, tous deux vous émouvoir, [2255]