Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/222

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pour que tout marchât à merveille. M. Drommel ne demande à être gouvernement que pendant quarante-huit heures pour réformer à jamais l’humanité. Par malheur, jusqu’à ce jour il ne s’est pas trouvé dans toute l’Allemagne un seul principicule qui consentît à lui prêter sa couronne d’un lever à un coucher de soleil. Il s’en plaint, car il croit fermement à sa méthode.

Cet homme a du caractère, une forte volonté. Son père, qui ne croyait pas à son génie et qui le destinait au commerce, l’envoya faire ses études dans une Realschule, où il n’apprit que quelques mots de latin. Il en appela, et le décret fut rapporté. Il répara le temps perdu, suppléa par ses efforts aux lacunes de sa première éducation. Quelques années plus tard, il était docteur, et, à peine fut-il docteur, il enseigna la sociologie à l’université de Koenigsberg en qualité de privat-docent. Ses doctrines furent jugées dangereuses, sans compter qu’il avait la déplorable habitude de levrauder, de vilipender, de déchirer à belles dents tous ses collègues. Du haut de sa chaire, il traita l’un d’eux d’asinus ridiculissimus, ce qui fut pris en mauvaise part. On lui donna des avertissements, des dégoûts ; il reconnut qu’il ne deviendrait jamais professeur ordinaire, ni même extraordinaire ;