Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/224

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s’étant permis de quitter un jour la salle des séances au moment où M. Drommel était à la tribune, M. Drommel se mit à bouder le gouvernement, se détermina à constituer un parti lui tout seul. Il représentait dans le Reichstag les drommeliens, et il n’y en avait qu’un, animal unique en son espèce. Sa solitude ne l’inquiétait pas, la synthèse est toujours solitaire. Il jouit de son bonheur pendant trois ans, mais il ne fut pas réélu. Cette mortification lui fut sensible ; il s’en consola en pensant que les temps n’étaient pas mûrs, que son jour viendrait.

On n’est jamais tout à fait conséquent. Quoique M. Drommel aspire à mettre la propriété en circulation, il ne laisse pas de posséder une maison fort cossue, qu’il ne songe point à faire circuler, et un assez grand nombre de titres de rente, dont il ne fait part à personne. On prétend qu’il est dur à la détente, qu’il ne laisse jamais voir sans de bons motifs la couleur de son argent. D’autre part, quoique le mariage soit à ses yeux une piètre institution, destinée à disparaître dans un prochain avenir, il eut à cinquante-quatre ans la faiblesse de se marier. Dans le temps qu’il était député, il avait conçu de tendres sentiments pour une danseuse de l’Opéra de Berlin. Cette charmante Francfortoise, qui passait pour être aussi sage que jolie,