Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il fit un geste d’indignation ; son dos grossit encore. — Ah ! monsieur le marquis, répliqua-t-il, vous n’avez jamais cru aux femmes, vous êtes un affreux sceptique. — Je le regardais, il me regarda ; je riais, il se mit à rire ; je crois que nous devions ressembler aux aruspices de Cicéron.

« Ce qu’il y a de bon, ma chère Mathilde, c’est que tu n’as plus besoin de rien m’expliquer. Écoute-moi bien ; voici exactement ce qui s’est passé. Ton fils Horace, cet égyptologue de grande espérance, qui me fait l’honneur d’être mon petit-neveu, est en Égypte depuis deux ans. Il y a rencontré une belle blonde, et pour la première fois son cœur a parlé ; il n’a pu se tenir de t’en écrire, ses lettres sont pleines de Mme Corneuil, et ta sollicitude maternelle s’est éveillée. N’est-ce que cela ? Fi donc ! tu es ingrate envers la Providence. Tu avais mille fois reproché à ton fils d’être un garçon trop sage, trop sérieux, trop plongé dans ses chères études, un farouche Hippolyte de l’érudition, méprisant le monde, les plaisirs, les femmes, les affaires, et ne caressant d’autre rêve que celui de composer quelque jour un gros livre qui révèlera à l’univers étonné des secrets vieux de quatre mille ans. Tu t’étais flattée de le mettre à la Chambre, ou au Conseil d’État, ou dans la diplomatie ;