Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/28

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à Mme Corneuil ; elle lui apprendra beaucoup de choses qu’il ignora et lui en fera désapprendre beaucoup d’autres : il boira dans ses beaux yeux l’oubli d’Aménophis III, de la dix-huitième dynastie, d’Amen-Apt la véridique et de l’homme au grand cône blanc. Ne lui envie pas ses tardifs plaisirs, sans compter qu’il est bon d’être charitable envers une pauvre garde-malade. Lui feras-tu un crime, à cette sainte femme, de se délasser de ses fatigues dans la société d’un beau jeune homme qui lui dit des douceurs en l’aidant à préparer ses tisanes ? Tout est pour la mieux, ma chère Mathilde. Puisque l’occasion se présente de t’en faire l’aveu, j’étais un peu mortifié de penser qu’Horace, mon futur héritier, avait attrapé l’âge de vingt-huit ans sans que personne lui connût une maîtresse ; son aventure me réjouit fort, et je suis bien tenté de faire mettre la chose dans les journaux. Mais toi-même, conviens-en… Les mères ont beau s’en défendre, rien ne les humilie tant que d’avoir un fils à qui le monde reproche d’être trop sage ; c’est un affront qu’on leur fait et qu’elles ont peine à digérer. Dieu bénisse Mme Corneuil ! La déesse Isis a trouvé à qui parler. Écris-moi incontinent que j’ai rencontré juste et que, toute réflexion faite, tu es aussi contente que moi. »