Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/293

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avec un sourire de majesté débonnaire ; comprirent-elles, en la dévorant, à quelle glorieuse main elles étaient redevables de leur bonheur ?

Au retour, la conversation tomba sur la gymnastique allemande. M. Drommel entreprit d’expliquer au prince de Malaserra que, grâce à un système d’éducation et d’entraînement que les autres peuples sont réduits à envier sans le pouvoir imiter, l’Allemagne est non seulement le seul pays où les femmes aient du Gemüth, mais le seul où les hommes aient des muscles. Pour l’en mieux convaincre, il retroussa ses manches et montra ses robustes poignets au prince, qui, hélas ! n’avait que son âme à montrer, tant il était maigre. Ils venaient en ce moment de laisser leur voiture sur le grand chemin, ils suivaient un sentier qui conduit à un chaos de rochers dont le propriétaire de Malaserra désirait faire les honneurs à son cher ami. Arrivés dans ce lieu sauvage et solitaire, M. Drommel voulut que le prince pût juger par ses yeux des prodiges qu’accomplit la gymnastique allemande. Il se mit à soulever d’énormes pierres, à porter à bras tendu des fragments de roc. Le prince émerveillé l’engagea à se débarrasser de son pardessus et de tout son attirail de touriste, qui le gênaient ; mais M. Drommel affirma que rien n’était capable de le