Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/34

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

voiles de crêpe. Mais elle lui permit d’écrire et s’engagea elle-même à lui donner réponse dans six mois ; en le quittant, elle avait aux lèvres un demi-sourire infiniment pudique, mais fort encourageant. Il avait remonté le Nil ; il avait gagné la Haute-Égypte, heureux de passer ses mois d’attente dans la solitude d’une Thébaïde, où les journées ont plus de vingt-quatre heures ; on n’en a jamais trop pour déchiffrer des hiéroglyphes en pensant à Mme Corneuil. Les crocodiles devaient jouer un grand rôle dans cette histoire. Horace était à Kéri ou Crocodilopolis quand il reçut un billet parfumé et vraiment exquis, destiné à lui apprendre que la femme adorée passait l’été avec sa mère sur les bords du lac Léman, dans une pension située à quelques pas de Lausanne, et que, si le comte de Penneville s’y présentait, il n’aurait pas besoin de frapper deux fois à la porte pour qu’elle s’ouvrit. Il était parti comme une flèche, il était accouru d’une seule traite à Lausanne. Il avait écrit de là à Mme de Penneville une lettre de douze pages, où il lui racontait son heureuse aventure avec des effusions de tendresse et de joie bien propres à la désespérer.

L’oncle et la nièce employèrent toute leur soirée à causer, à délibérer, à discuter. Comme il arrive d’ordinaire en pareil cas, on répétait jusqu’à vingt