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CEYLAN.

VIII

11 novembre.

Ce matin, une grande surprise en m’éveillant de me trouver ici devant la route rouge, devant les petites maisons tapies entre les verdures des collines. A cette première heure, les choses ont un éclat inconnu, un lustre humide et frais. Aux flancs ses hauteurs, des brumes d’argent traînent, enveloppent de leur mollesse les palmes étagées qui sortent des vapeurs avec de pâles lueurs d’or, toutes ruisselantes de rosée, toutes brillantes d’une clarté vierge. Personne sur la route qui mène aux Peradinya-Gardens, rien que cette végétation parfumée de paradis jeune, tout neuf, où l’homme n’aurait pas encore paru.

Au détour d’un chemin, on rencontre un pont de bois noir, et vraiment l’on demeure saisi. En pleine lumière, entre deux murs de verdures massives, un fleuve roule avec lenteur son onde boueuse et luisante. Pas un flot, pas une ride, pas un frisson : l’eau lourde avance d’un seul mouvement, comme emportée tout d’une pièce, son éclat brun coupé d’ombres violentes, immobiles. Des deux côtés, la luxuriance de la végétation humide ; à gauche, des plans superposés de nobles palmes.