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Page:Choderlos de Laclos - Les Liaisons dangereuses, 1869, Tome 1.djvu/43

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DANGEREUSES.


Lettre IX.

Madame de Volanges à la présidente de Tourvel.

Je n’ai jamais douté, ma jeune & belle amie, ni de l’amitié que vous avez pour moi, ni de l’intérêt sincère que vous prenez à tout ce qui me regarde. Ce n’est pas pour éclaircir ce point, que j’espère convenu à jamais entre nous, que je réponds à votre réponse : mais je ne crois pas pouvoir me dispenser de causer avec vous au sujet du vicomte de Valmont.

Je ne m’attendais pas, je l’avoue, à trouver jamais ce nom-là dans vos lettres. En effet, que peut-il y avoir de commun entre vous & lui ? Vous ne connaissez pas cet homme : où auriez-vous pris l’idée de l’âme d’un libertin ? Vous me parlez de sa rare candeur : oh ! oui ; la candeur de Valmont doit être en effet très-rare. Encore plus faux et dangereux qu’il n’est aimable & séduisant, jamais, depuis sa plus grande jeunesse, il n’a fait un pas ou dit une parole sans avoir un projet, & jamais il n’eut un projet qui ne fût malhonnête ou criminel. Mon amie, vous me connaissez, vous savez si des vertus que je tâche d’acquérir, l’indulgence n’est pas celle que je chéris le plus. Aussi, si Valmont était entraîné par des passions fougueuses ; si, comme mille autres, il était séduit par les erreurs de son âge, blâmant sa conduite, je plaindrais sa personne & j’attendrais, en silence, le temps où