Page:Choquette - La Terre, 1916.djvu/270

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enfant, un père ne peut-il point tout oser sans rougir ? »

Son intention était bien de jeter au cou de Yves une délicieuse amarre propre à l’ancrer pour toujours à la terre de Saint-Hilaire, mais sa sollicitude paternelle se préoccupait pareillement de trouver enfin du bonheur à jeter dans le vieux foyer natal, le sien, de nouveau menacé par le départ de Marcelle et si amèrement refroidi de toutes les ardentes tendresses d’autrefois. Il n’avait même jamais réfléchi, dans son orgueil pour Yves, que son état de cultivateur pût présenter un obstacle et établir une véritable différence de condition sociale. C’est d’égal à égal qu’il irait traiter. Et sans plus d’hésitation, il s’était mis en route.

Ce fut de ce pied d’ailleurs que le docteur l’avait reçu, car sa propre origine paysanne, dont il se parait comme d’une auréole, les relations d’intimité que sa profession lui avait créées parmi les habitants de la région, la notoriété qui de plus s’attachait au chef de la famille de Beaumont chez lequel on se plaisait à voir un vrai gentilhomme campagnard, tout cela le disposait à accorder à celui-ci le plus sympathique accueil.

La confidence qu’il reçut l’avait toutefois un peu étonné.

— « Cette Marianne en a-t-elle un flair ? » Ne put-il s’empêcher de penser, en se rappelant les mystérieuses réticences dont elle se plissait énigmatiquement les lèvres quand il l’interrogeait au sujet de Jacqueline. « Chez ces vieilles filles, il reste donc toujours