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Page:Choquette - La Terre, 1916.djvu/284

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semailles, les rigoles à curer, les clôtures à mettre en ordre, ce qui lui restait de labours à compléter.

… Une dernière fois il avait fait pivoter son attelage sur le cintre, le soc de la charrue pointé pour un nouveau sillon ; puis il avait décroché les traits des palonniers et les avait sans façon rejetés flottants sur le dos de ses chevaux dociles pour le retour au logis. L’âme gaie, fier du labeur accompli, une image chère dans la pensée, le pas aussi leste et dispos qu’au matin, il s’était acheminé à leur suite.

Le crépuscule, qui, en automne, vient tôt et vite, avait commencé d’émousser les objets et d’aviver en retour les bruits lointains en leur donnant je ne sais quel accent d’impressionnante sonorité.

Et au milieu de cet alanguissement mourant du soir, une voix avait tout à coup jailli, on ne pouvait dire d’où : de quelque plaine voisine, d’un versant de la Montagne, de quelque chariot attardé en route ; c’était impossible à préciser.

Cette voix, seule… seule, sans nul accompagnement, sans nulle musique jumelle pour en modifier le timbre, jetait dans le calme du soir les majestueuses paroles du Credo du Paysan :


L’Immensité, les cieux, les monts, la plaine,
L’Astre du jour qui répand sa chaleur,
Les sapins verts dont la montagne est pleine
Sont ton ouvrage, Ô divin Créateur !
Humble mortel devant l’œuvre sublime,
À l’horizon quand le soleil descend.
Ma faible voix s’élève de l’abîme,
Monte vers toi, vers toi Dieu tout puissant.