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L’ŒIL DU PHARE

viennent chaque année prodiguer chez nous leur admiration de commande avec leur argent. Les sentiments personnels qui peuvent parler au cœur de son père et de sa mère, qu’il simulera peut-être de partager par déférence ou pour ne pas y contredire, à son for intérieur tout d’abord ne diront presque rien, à lui qui est né et qui a vécu jusqu’à présent sous un autre ciel. De là pour lui le désir irrésistible de passer outre aux choses du village natal de sa famille, pour voir ailleurs et voir encore ; de poursuivre un itinéraire et un programme, afin d’avoir plus tard à en parler sciemment. L’accointance momentanée de ses parents canadiens ne sera qu’un épisode de voyage, une sorte d’idylle d’amour familial, impromptue et passagère. Il a déjà tant voyagé, tant vu, tant appris !

Jean, au contraire, n’est qu’un primitif, ne connaissant guère que les choses concrètes de son village et le rêve ténu qu’a pu laisser dans son esprit la lecture des livres. La maladie qui s’annonce chez lui ne fera qu’accentuer l’irréalisme de son