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DE GUILLAUME DE NANGIS

il s’arrêta dans une abbaye, et expira peu de temps après à l’insu des Français. Quoique les plus vaillans et les plus nobles du royaume d’Aragon eussent assisté à ce combat, il y en eut peu cependant, dans un si grand nombre, qui s’en retournassent chez eux. A la suite de cette affaire, les habitans de Gironne, n’ayant plus aucun secours à attendre, rendirent leur ville au roi de France qui y mit une garnison. Le roi de France, ignorant la mort du roi Pierre, et attaqué de maladie, licencia une partie de sa flotte, et se retira vers Narbonne, à cause de l’approche de l’hiver. Les Aragonais ayant appris son départ, tuèrent un grand nombre de Français, et enlevèrent les vaisseaux qui étaient restés dans le port de Roses. Peu de temps après, assiégeant la ville de Gironne, ils forcèrent à se rendre les Français laissés pour la défendre. Le roi de France, qui était parti malade, étant arrivé à Perpignan, mourut en cette ville. Sa chair et ses entrailles furent ensevelis à Narbonne dans la grande église, et ses os, ainsi que son cœur, furent portés à Saint-Denis en France. Mais, avant qu’on ne les eût enterrés dans ce monastère, il s’éleva au sujet du cœur une grande dissension entre les moines dudit lieu et les frères Prêcheurs qui demeuraient à Paris ; car lesdits frères voulaient, malgré les moines, obtenir ce cœur pour l’ensevelir à Paris dans leur église, parce que le jeune roi Philippe, héritier du trône, en avait fait la promesse à un certain frère de l’ordre des Jacobins. Mais enfin, le roi de France, ému par les instances des frères, et regardant comme honteux de se dédire, fit, contre les conseils de beaucoup de gens, ensevelir le cœur à Paris,