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CHRONIQUE

Ainsi donc fut prise Jérusalem, la cité sainte, quatre-vingt-huit ans après qu’elle avait été arrachée aux Turcs. Les nôtres la possédèrent à peu près autant de temps que les Turcs l’avaient auparavant possédée. Les Syriens, les Géorgiens, les Jacobites, les Grecs et les Arméniens, restèrent dans Jérusalem sous la domination des Turcs, réduits en esclavage. Dès que le récit du malheur du pays d’outre-mer eut été entendu dans l’Occident, il blessa le cœur de tous d’une poignante douleur. Le pape Urbain ayant appris une si déplorable nouvelle, en fut saisi d’une grande affliction, et, tombant en langueur, mourut peu de temps après, et fut enterré à Ferrare. Il eut pour successeur Grégoire vin, Bénéventin de nation, cent soixante-dix- septième pape de l’Église romaine. Mais, deux mois après, étant venu à Pise, et ayant rétabli la paix entre les habitans de cette ville et ceux de Gènes, qui étaient en discorde, et prêché de toutes ses forces pour le secours de Jérusalem, ô douleur ! à l’approche de la Nativité du Seigneur, Grégoire fut enlevé à la vie de ce monde. On l’enterra avec honneur dans la ville de Pise. Après lui, Clément III, Romain de nation, fut le cent soixante-dix-huitième pape qui gouverna l’Église de Rome. L’empereur de Constantinopie et le roi de Sicile furent ramenés à la paix.


[1188]

Gui, roi de Jérusalem, délivré de la prison de Saladin, s’avança vers Tyr, mais le marquis Conrad lui refusa l’entrée de cette ville. Le roi, dissimulant sagement cet affront, demeura pendant un an tantôt à Antioche, tantôt à Tripoli, attendant que les Chrétiens d’outremer vinssent au secours de la Terre- Sainte. Philippe, roi de France, et Henri, roi d’an-