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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/344

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Mais voyons ce que signifie, « O mon âme, louez le Seigneur ! » Chantons, nous aussi, avec David, ces paroles en ce jour ; si le corps de David n’est pas présent au milieu de nous, son esprit est présent. Voulez-vous la preuve que les justes sont présents au milieu de nous, qu’ils chantent avec nous ? Écoutez la réponse d’Abraham au riche. En effet, « celui-ci lui disait : envoyez-moi Lazare, afin que mes frères, apprenant ce qui se passe dans l’enfer, se corrigent. Abraham lui répond : ils ont Moïse et les prophètes. » (Luc. 16,24,28-29) Or, il y avait longtemps que Moïse et les prophètes étaient morts, quant à leurs corps ; mais, par leurs écrits, ils se trouvaient au milieu des Juifs. Si l’image inanimée d’un fils ou d’un ami vous fait croire à ! a présence de celui qui n’est plus, si cette image inanimée vous le montre, à bien plus forte raison, jouissons-nous, par les saintes Écritures, du commerce des Saints ; nous n’avons pas leurs û)i lis, mais nous avons les images de leurs âmes ; les paroles dites par eux, sont les images de leurs âmes. Voulez-vous la preuve que les justes sont vivants et présents ? On ne prend jamais les morts à témoin. Eh bien ! le Christ les a pris à témoin de sa divinité, et particulièrement David, afin de vous apprendre que David est vivant. Les Juifs doutaient de la divinité du Christ : il leur dit : « Que vous semble du Christ ? De qui est-il fils ? Ils lui répondent : De David. Et comment donc, » leur dit-il, « David l’appelle-t-il, en esprit, son Seigneur par ces paroles : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Asseyez-vous à ma droite ? » (Mat. 22,42-44 ; Psa. 109,1) Comprenez-vous que David est vivant ? S’il n’était pas vivant, Jésus-Christ ne l’aurait pas pris comme témoin de sa divinité. Jésus-Christ ne dit pas : Et comment donc David l’a-t-il appelé en esprit son Seigneur ? Mais. « l’appelle-t-il son Seigneur ? » pour montrer qu’il est encore présent, et qu’il parle par ses écrits. Il chantait autrefois ses psaumes ; chantons avec David aujourd’hui ; David avait une cithare, faite de cordes inanimées ; l’Église a une cithare, faite de cordes vivantes ; nos langues sont les cordes de la cithare, elles font entendre avec la diversité des sons, l’harmonie de la piété ; les femmes, les hommes, les vieillards, les jeunes gens se distinguent par l’âge ; mais non par le chant des hymnes ; l’Esprit-Saint, modifiant chaque voix une à une, ne compose, de toutes les voix, qu’une seule mélodie, ce qu’a exprimé David lui-même, en appelant tous les âges, les deux sexes à ce concert. « Que tout esprit loue le Seigneur ; ô mon âme, louez le Seigneur. » Pourquoi a-t-il oublié la chair ? pourquoi ne s’adresse-t-il pas du tout au corps ? A-t-il fait deux parts de l’être vivant ? Nullement ; mais il excite d’abord l’artiste. Ce qui prouve qu’il n’a pas fait deux parts, l’une du corps, l’autre de l’âme, c’est ce qu’il dit, écoutez : « Mon Dieu, mon Dieu, je veille, et j’aspire vers vous, dès que la lumière paraît ; mon âme brûle d’une soif ardente pour vous, et en combien de manières nia chair se sent-elle aussi pressée de cette ardeur ! » (62, 2) Mais montrez-moi, me dit-on, que le Psalmiste, convie la chair aussi à faire entendre des hymnes : « Mon âme, bénissez le Seigneur, et que tout ce qui est au-dedans de moi, bénisse son saint nom. » (Psa. 102,1) Voyez-vous que la chair aussi prend part au concert ? Que signifient ces paroles : « Et que tout ce qui est au dedans de moi, bénisse son saint nom ? » Le Psalmiste entend par là les nerfs, les os, les veines, les artères, et toutes les parties à l’intérieur.
3. Mais comment les parties, qui sont dans notre corps, peuvent-elles bénir Dieu ? elles n’ont pas de voix, elles n’ont pas de bouche, elles n’ont pas de langue ; l’âme a ce pouvoir, mais les parties, intérieures de notre corps, comment l’auraient-elles ? comment pourraient-elles, sans voix, sans langue, sans bouche, bénir le Seigneur ? De la même manière que « les cieux racontent la gloire de Dieu. » (Psa. 18,1) De même que le ciel n’a ni langue, ni bouche, ni lèvres, mais, par la beauté du spectacle qu’il présente, saisit les spectateurs, des merveilles qu’il étale, et les porte à bénir Celui qui l’a créé ; de même, les parties intérieures de notre corps étonnent la pensée qui considère tant de fonctions diverses, d’opérations, de force, d’harmonie, et toutes les beautés de forme, de position ; les lois mathématiques qui gouvernent le tout avec tant d’ensemble, et l’on s’écrie comme le Prophète : « Que vos ouvrages sont magnifiques, ô Seigneur ! vous avez tout fait avec sagesse. » (Psa. 103,24) Voyez-vous comme nos entrailles, sans voix, sans bouche, sans langue, bénissent le Seigneur ? Pourquoi donc le Psalmiste s’adresse-t-il à son âme ? C’est pour empêcher, pendant que la langue fait entendre des sons,