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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/88

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n’aura pas lieu pour tous. Sa résurrection s’étendra bien à tous, mais la résurrection glorieuse rie sera le partage que de ceux qui auront bien vécu. « L’homme sans raison et l’homme sans intelligence périront en même temps, et ils laisseront leurs richesses à des étrangers. Leur sépulture sera leur demeure de siècle en siècle, et ils avaient appelé leurs terres de leur nom (12). » Un autre dit, « l’intérieur de leurs maisons de siècle en siècle. » Un autre, « leurs demeures de génération en génération, et ils ont appelé la terre de leur nom. » Ce que l’hébreu rend par ces mots « ale adomoth. »
6. Avez-vous vu comme il nous éloigne du vice et de la cupidité, et nous conduit vers la vertu, non seulement en nous parlant des avantages de la vie future, mais encore en faisant ressortir les avantages de la vie présente, en éteignant notre folle passion pour les richesses, en traitant d’insensés ceux qui n’ont d’yeux que pour les biens d’à présent, et en le prouvant par des faits ? Quoi de plus insensé, dites-moi, qu’un homme qui se fatigue et se tourmente, et amasse tant de richesses, pour qu’un autre jouisse du fruit de ses peines ? Quoi de plus triste que cette inutile dépense de travail ? Cet homme, après avoir versé sa sueur et supporté tant de fatigues, s’en va de ce monde, et laisse à d’autres la jouissance de ses biens, non pas toujours à ses parents et à ceux qu’il connaît, mais bien souvent à ses adversaires, à ses ennemis ! Aussi le Prophète n’a-t-il pas dit : Ils laisseront leurs biens à d’autres, mais : « Ils laisseront leurs biens à des étrangers. » Que veut-il dire par ces mots – « L’homme sans raison et l’homme sans intelligence périront en même temps ? » Ces paroles, sont une suite de ce qui précède il me paraît que dans ce passage il fait allusion aux impies, à ceux qui n’ont d’yeux que pour les biens présents, qui ne songent pas à l’avenir et qu’il appelle pour cela des insensés. Si vous croyez, qu’il n’y a plus rien après cette vie, pourquoi vous fatiguer et vous rendre malheureux pour amasser de tous côtés d’immenses richesses, pourquoi supporter les travaux, et ne pas jouir des résultats qu’ils amènent ? « Et leurs tombeaux seront leurs demeurés de siècle en siècle. » Le Psalmiste, en parlant ainsi, ne fait qu’exprimer, la secrète pensée de ces hommes-là. « Ce sera leur séjour de génération en génération : ils ont appelé leurs terres de leur nom. » Quelle pire folie que de nous dire qu’on tombeau sera notre demeure éternelle, et de mettre notre amour-propre à nous élever de beaux monuments funèbres !
Bien des hommes se sont fait construire des tombeaux plus magnifiques que des maisons. En faisant ces dépenses, qui ne sont pas nécessaires, ils se fatiguent et se donnent de la peine soit pour leurs ennemis, soit pour les vers et pour la poussière. Telles sont les préoccupations de ces hommes qui n’espèrent pas en la vie future. Et à ce propos, l’idée me vient de déplorer le sort de ce grand nombre d’hommes qui, tout en conservant l’espoir d’une vie future, imitent en cela ceux qui ne partagent nullement le même espoir, et se montrent pires qu’eux en bâtissant des tombeaux, en faisant construire de superbes monuments, en enfouissant de l’or, et en transmettant leurs biens à d’autres hommes. Celui qui n’attend plus rien après cette vie, s’il se donne de la peine pour les biens de ce monde, agit déraisonnablement sans doute, mais agit conformément à sa croyance qui lui interdit l’espoir d’une autre vie. Mais toi, ô homme, qui connais la vie future, et ces biens ineffables qu’annonce l’Évangile lorsqu’il dit que « les justes alors brilleront comme le soleil (Mt. 13,43) », sur quel pardon comptes-tu, sur quelle excuse ? Que ! châtiment ne mériterais-tu pas, toi qui dépenses toute ton énergie pour de la poussière, pour de la cendre, pour des tombeaux, pour des adversaires, pour des ennemis ?
« Ils ont appelé leurs terres de leur nom. » Voici un autre genre de folie : ils donnent leur nom à des maisons, à des propriétés, à des salles de bains, et croient gagner à cela un beau sujet de satisfaction, et poursuivent l’ombre à la place de la vérité. Si tu désires laisser une mémoire durable, ne donne pas ton nom à des maisons, ô homme, mais dresse un trophée de bonnes actions, qui protégeront ton nom dès cette vie, et qui te procureront la vie future avec un repos éternel. Si tu tiens à laisser ton souvenir, je vais t’enseigner la vraie route et la plus facile à suivre : pratique la vertu. Bien ne rend notre nom immortel comme la vertu. Et pour preuve, vois les martyrs, vois les reliques des apôtres, vois quels souvenirs ont laissés ceux qui ont bien vécu. Que de rois ont fondé des villes, creusé des ports, et s’en sont allés après leur avoir donné leur nom ? Ils n’y ont rien gagné, le silence et l’oubli ont dévoré (76)