Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/509

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était considérée comme sœur de son fils, pourvu qu’elle eût acquis les droits de fille auprès du père en tombant sous sa puissance : Sororis autem loco nobis est etiam mater, aut noverca, quae per in manum conventionem apud patrem nostrum jura filiae consecuta est. (Gaii Comm., III, § 14.) C’est donc à ce titre, et non pas simplement comme mère, que Sassia eût hérité de Cluentius.

XVII Aletrium. Le municipe d’Alétrium était voisin d’Arpinum, patrie de Cicéron.

XIX. Illi aetai, qua tum eram. Cicéron avait pourtant alors déjà trente-deux ans, et il devait savoir se décider par d’autres raisons que celles qui excusent un jeune homme.

XX. Lege Cornelia. Loi du dictateur Sylla, de sicariis et veneficis, qui laissait à l’accusé le droit d’exiger que les jurés donnassent leur suffrage de vive voix. L’usage du scrutin avait été introduit, l’an de Rome 615, par la loi Cassia, dans tous les jugements, excepté ceux de haute trahison.

Laudatoribus. Les accusés produisaient ordinairement des personnes qui faisaient leur éloge et attestaient leur bonne conduite et l’honnêteté de leurs mœurs. Il fallait avoir au moins dix laudatores, sans quoi il valait mieux n’en avoir aucun. Il ne faut pas les confondre avec les témoins à décharge, qui avaient quelque chose de positif à dire sur le fond de l’accusation ; ni avec les advocati, c’est-à-dire, les amis qui venaient appuyer l’accusé de leur présence et de leur crédit, mais sans plaider ni déposer en sa faveur.

XXI. Ut reliqua posset perorare. Quintilien, VI, 3, nous apprend qu’il n’y a de vrai dans tout ce récit que la retraite de Fabricius. Tout ce que Cicéron met dans la bouche de l’avocat est inventé pour le rendre ridicule, et dérider la gravité des juges. Quintilien loue ce moyen comme adroit et oratoire.

XXII. Fabriciorum. Scamander, comme affranchi de Fabricius, portait le nom de son patron ; et pour abréger, ou plutôt pour confondre leurs deux causes en une seule, Cicéron les désigne tous deux par ce seul nom.

Judicia senatoria. Sylla avait ôté les jugements aux chevaliers pour les attribuer aux seuls sénateurs. On voit dans les Verrines combien la partialité de ces nouveaux juges, et surtout leur vénalité, excitaient de plaintes. Enfin, l’an 683, le préteur L. Aurélius Cotta fit rendre une loi qui appelait indistinctement aux fonctions de juges, ou pour parler plus exactement, de jurés, les sénateurs, les chevaliers et les tribuns du trésor, qui représentaient l’ordre des plébéiens, mais qui presque tous étaient aussi chevaliers.

XXIII. Separatim cognoscite. Quintilien, v, 10, cite cet endroit comme un modèle d’argumentation. Le dilemme parait en effet concluant. Mais il y a une troisième supposition dont l’orateur se garde bien de parler, et qui est probablement la seule véritable : c’est que Cluentius et Oppianicus avaient l’un et l’autre employé la corruption. Le président de Brosses, Histoire de la République romaine, III, 19, ne révoque pas en doute ce fait, que d’ailleurs Cicéron lui-même (contre Verrès, action I, chap. 13) affirme positivement. On ne doit pas s’étonner que cet habile orateur se soit vanté (au rapport de Quintilien, II 17) d’avoir fait illusion aux juges dans l’affaire de Cluentius : se tenebras offudisse judicibus in causa Cluentii.

XXV. Atellæ. Atella est une ville des Volsques. Cependant ce mot paraît être ici le surnom de Salinius. On ne connaît aucun détail de cette affaire

XXVI. Ut erat semper praeposterus atque perversus. Littéralement : Comme il faisait tout à contretemps, et en renversant l’ordre accoutumé. On sentira facilement pourquoi nous n’avons pas fait entrer cette phrase dans la traduction. Elle fait allusion aux mots suivants, initium facit a Bulbo, où l’orateur joue sur le nom propre. Bulbus signifie un oignon ; or ce n’est pas sans doute par ce légume que l’on commence un repas. Stalénus est donc præposterus en commençant par Bulbus. Ces plaisanteries sont bien froides ; cependant il parait qu’elles ne choquaient pas les Romains, puisque Quintilien, IV, 2, cite ce passage sans aucune réflexion.

Stalenus cognomen. Stalénus, à ce qu’il paraît d’après ce passage, était Ligurien. Il s’était introduit, on ne sait comment, dans la famille des Élius. Or cette famille était divisée en deux branches, dont l’une avait pour surnom Pœtus, l’autre Ligur. Il choisit le surnom de Pœtus, parce que celui de Ligur aurait rappelé son origine étrangère et son caractère fourbe et artificieux, car si l’on en croit les anciens, les Liguriens étaient grands menteurs : Virgile, Énéid., XI, 700 :

Incidit huic, subitoque adspectu territus haesit
Apenninicolae bellator filius Auni,
Non Ligurum extremus, dum fallere fata sinebant.

XXXIII. Ad quœstionem ipse abreptus est. Cicéron affecte ici de regarder comme une véritable magistrature la qualité de Juge de la question, dont Junius était revêtu. Ce n’était pourtant qu’une simple commission, une délégation d’une partie des pouvoirs de la préture. Le préteur était président en titre et chef d’un tribunal. Le Juge de la question était un président délégué et comme un vice-préteur ; mais il n’était point magistrat. Il est donc à présumer que la loi permettait d’accuser Junius avant que sa commission fat expirée ; mais que l’usage, les convenances, et l’analogie de ses fonctions avec celles de la préture auraient dû retenir le tribun. C’est ce manque d’égards et de convenances que Cicéron transforme ici en attentat contre la loi.

At ipse ea lege quærebat. Les Romains n’avaient pas, comme nous, un code criminel où tous les crimes fussent prévus et soumis à des lois générales. Il y avait une loi particulière pour chaque espèce de crime. L’accusateur déclarait, en intentant son action, en vertu de quelle loi il entendait poursuivre, et alors le préteur le renvoyait devant le tribunal chargé d’appliquer cette loi. Car il n’y avait pas non plus un tribunal unique qui prononçât successivement sur toute espèce d’accusation. Il y avait, pour chaque genre de causes, un tribunal particulier formé d’un certain nombre de jurés que présidait un préteur ou un Juge de la question. Quelques tribunaux cependant réunissaient plusieurs sortes d’affaires. Ainsi il n’y en avait qu’un seul pour juger les empoisonneurs, les faussaires et les juges corrompus ; voilà pourquoi Junius, comme juge corrompu, aurait dû être cité au même tribunal où il avait condamné Oppianicus comme empoisonneur.

XXXIV. Quod contra aliam legem commiserat. Un homme accusé devant un tribunal ne pouvait être jugé que sur le crime qui était de la compétence de ce tribunal. Mais l’accusateur ne manquait pas de faire le détail de tous les autres crimes qui pouvaient être imputés à son adversaire, et souvent c’était un fait étranger au motif apparent de l’accusation qui déterminait les jurés. C’est pourquoi Attius prétend ici que Junius fut à la vérité accusé de n’avoir pas prêté le serment ordinaire, ni tiré au sort les jurés suppléants, mais qu’il fut en effet condamné pour s’être laissé corrompre par Cluentius. Cicéron répond, avec raison, que cette manière de juger est souverainement injuste. Mais lui-même, pour justifier la condamnation d’Oppiani-