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DE LA VIEILLESSE.

serait mortelle. Notre âme est dans un mouvement continuel ; ce mouvement, qui est inhérent à sa nature, n’a pas eu de commencement ; il n’aura pas non plus de fin, parce qu’il ne peut s’abandonner lui-même. D’autre part, l’âme étant simple de sa nature et sans aucun mélange de substances hétérogènes, elle ne peut être divisée, et ce qui ne peut être divisé ne peut périr. Ajoutez que les hommes viennent au monde avec certaines notions qui paraissent innées : ce qui en est une grande preuve, c’est que les enfants, en apprenant des arts difficiles, saisissent un nombre infini de choses avec une telle promptitude, qu’ils semblent plutôt se les rappeler que les apprendre pour la première fois. Tel est, à peu près, le système de Platon.

XXII. Dans Xénophon, l’ancien Cyrus dit en mourant : « Gardez-vous bien de croire, ô mes chers fils ! que lorsque je vous aurai quittés, je ne serai nulle part, ou que je n’existerai plus. Tant que j’ai été avec vous, vous n’avez pas vu mon âme ; mais vous compreniez, par mes actions, qu’elle animait ce corps périssable. Croyez donc toujours que cette même âme existe, tout invisible qu’elle sera pour vous. Certes les hommages qu’on rend aux grands hommes ne leur survivraient pas longtemps, si la conviction où nous sommes que leur âme subsiste encore ne nous faisait honorer leur souvenir(30). Pour moi, je n’ai jamais pu croire que les âmes, qui vivent tant qu’elles sont dans des corps mortels, meurent aussitôt qu’elles en sortent, ni qu’elles perdent toute intelligence en quittant des corps sans intelligence. J’ai toujours pensé, au contraire, que dégagées alors de tout mélange corporel, et recouvrant la pureté originelle de leur nature, elles s’élevaient à la sagesse suprême. De plus, lorsque la mort dissout l’homme, on voit clai-