Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/343

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avaient eu quelque part au butin, crièrent d’une voix unanime qu’il valait autant que Verrès prît toute la succession : le bruit fut si grand dans le sénat, que le peuple accourut.

XX. L’affaire était devenue trop publique pour que le préteur n’en fût pas promptement instruit. Irrité contre ceux qui avaient rendu les comptes, plein de fiel contre ceux(38) qui s’étaient récriés, notre homme entra dans l’accès de la plus violente colère. Cependant il se montra pour lors tout différent de lui-même. Vous connaissez son effronterie, vous connaissez son audace ; toutefois la rumeur publique, le scandale et l’évidence d’un vol si considérable lui firent d’abord perdre la tête. Quand il se fut un peu remis, il manda les commissaires syracusains. Ne pouvant nier l’argent donné par eux, il ne chercha pas loin, la chose n’aurait pas été facile à prouver ; mais avisant un de ses parens, qui était comme son second fils, il l’accusa de s’être approprié cette somme, et déclara qu’il le forcerait à restituer. Celui-ci ne fut pas plus tôt informé de cette calomnie, que, tout occupé de ce qu’il devait à son rang, à son âge, à sa naissance, il vint s’expliquer devant le sénat, et démontra qu’il n’était pour rien dans cette affaire ; il parla de Verrès sans détour, et dit ce que tout le monde en pensait. Aussi les Syracusains ont-ils depuis érigé une statue à ce citoyen, qui, dès que la chose lui fut possible, s’éloigna du préteur, et quitta la province. On nous dit pourtant que Verrès ne cesse de se plaindre de se voir poursuivi pour des fautes qui ne sont pas les siennes, mais bien celles de ses gens. Vous avez, Verrès, gouverné trois ans la Sicile : le jeune homme que vous aviez choisi pour gendre n’a passé qu’une année avec vous ; ceux de vos commensaux et de vos