Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/51

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puisque, pour l’avarice, la perversité, la déloyauté, il a pu vous croire semblables à lui.

XV. Du poste où vous êtes élevés(88), juges, j’en atteste les dieux immortels, vous ne sauriez trop veiller sur vous-mêmes, et porter vos regards dans l’avenir : je vous en avertis, je ne puis assez vous le répéter, oui, je suis convaincu que les dieux vous ont offert l’occasion la plus favorable pour délivrer l’ordre entier des sénateurs, de la haine, des préventions, de l’infamie, et d’un honteux avilissement. On est persuadé qu’il n’y a dans les arrêts des tribunaux, ni sévérité, ni équité ; qu’il n’y a même plus de justice. Aussi sommes-nous en butte au dédain, au mépris du peuple romain, accablés sous le poids d’une longue ignominie. N’allons pas chercher d’autre cause de la chaleur extrême avec laquelle le peuple romain a réclamé le rétablissement de la puissance tribunitienne(89) ; c’était moins cette puissance qu’il voulait recouvrer, qu’obtenir enfin des tribunaux équitables. Cette vérité n’échappa point à la sagacité de l’illustre Q. Catulus(90) : lorsque Cn. Pompée(91), ce vaillant et glorieux citoyen, proposa le rétablissement de la puissance tribunitienne, Catulus, à qui on demandait son avis, commença par ces paroles pleines d’autorité : « Les pères conscrits administrent mal et scandaleusement la justice ; et s’ils eussent dans les tribunaux voulu répondre à l’attente du peuple romain, la puissance des tribuns n’aurait pas été si vivement regrettée. » Enfin, lorsque Pompée, haranguant pour la première fois le peuple aux portes de la ville(92), en qualité de consul désigné, vint à traiter le point qui semblait devoir être le plus vivement attendu, et fit entendre qu’il rétablirait la puissance tribunitienne, il fut accueilli par un léger bruit, un léger